Un bureau d'abstention a été créé à Clermont-Ferrand.
Un bureau d'abstention a été créé à Clermont-Ferrand. - F. RENDA
 

« Il faut montrer à ceux qui votent que nous aussi on se bouge. » S’il y a bien une image que combat Franck Renda, c’est celle de « l’abstentionniste qui reste sur son canapé. » Cet humoriste, très actif sur Facebook, a lancé le mouvement des Bureaux d’abstention.

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« C’est une première mondiale. Concrètement, les abstentionnistes peuvent se rendre au bureau le plus proche de chez eux. Nous installerons une urne et préparerons des bulletins "je m’abstiens". C’est l’occasion de discuter ensemble et de montrer que l’offre politique ne nous convient pas. »

Le réseau s’est tissé de semaines en semaines et compte aujourd’hui 70 bureaux, comme à Clermont-Ferrand ou Poitiers. « Je sais toujours quoi répondre aux gens qui ne cautionnent pas l’abstention. Mais quand on me disait "vous, vous ne faites rien pour améliorer les choses", je ne savais plus quoi dire. C’est comme ça que l’idée m’est venue. »

« On s’est dit qu’on allait occuper des places »

Accompagné par un avocat, le mouvement a créé une pétition en ligne pour comptabiliser ses soutiens. Ses membres se sont aussi associés à Antoine Buéno, ancienne plume de François Bayrou et auteur d’un manifeste pour l’abstention. « Il faut que les politiques comprennent qu’on n’est pas d’accord avec ce qu’ils nous présentent. »

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A Paris, Génération ingouvernable organise des assemblées et des pique-niques presque toutes les semaines « pour discuter de l’actualité politique », selon Mike, un des coordinateurs. Le mouvement organise aussi des réunions publiques pour décider de la conduite à tenir la journée du 23 avril.

« On s’est dit qu’on allait occuper des places pour que les gens puissent nous rencontrer et qu’on échange ensemble. On ne sait pas encore exactement où on ira. Place de la Bastille, c’est connoté à gauche. Et la place de la République a connu des événements plus tristes. On pourrait aussi retransmettre les résultats sur grand écran », explique Mike, un des gérants du mouvement à Paris. « Avec toutes ces histoires de corruption, on considère les candidats comme dangereux », poursuit le jeune homme qui dit ne plus se reconnaître « dans le processus électoral. »

Le réseau prend forme

« Alors qu’avant les abstentionnistes restaient isolés, on commence maintenant à être en relation les uns avec les autres. C’est sûr, c’est encore embryonnaire, mais nous entretenons cette culture comme une petite flamme », raconte Antoine Peillon, auteur de Voter c’est abdiquer. « Je ne veux plus entendre dire que nous sommes irresponsables. Nous manifestons, faisons partie d’associations et avons des responsabilités économiques à notre niveau. »

A ceux qui l’accusent de faire le jeu du FN, il rétorque qu’il existe une sorte de « vase communicant » entre les deux. « Le FN fait des pieds et des mains pour mobiliser les électeurs abstentionnistes. Ça prouve bien que sans eux, ils ne sont pas si forts que ça. »

Des électeurs frontistes, Franck Renda en a croisé beaucoup lors de ses déplacements. « Un couple de personnes âgées a trouvé notre démarche super. Ils ont dit qu’ils allaient voter une dernière fois Le Pen et qu’ils s’abstiendraient ensuite. Je leur ai suggéré qu’il vaut mieux faire une chose une première fois, plutôt que faire une chose une dernière fois. Ils étaient bouche bée. »

L’organisateur regrette que le vote blanc ne soit pas reconnu. Pour lui, le plus important maintenant, c’est de ne plus passer inaperçu.