Englué dans la crise des "gilets jaunes" qui a atteint un paroxysme samedi dernier avec des scènes de guérilla urbaine à Paris, l'exécutif a fait des concessions.
Envoyé en première ligne, le Premier ministre Édouard Philippe a annoncé mardi midi 4 décembre trois mesures censées "ramener l'apaisement et la sérénité dans le pays", parmi lesquelles la suspension de la hausse des taxes sur le carburant pendant 6 mois, à partir du 1er janvier. L'exécutif avait pourtant martelé qu'il devait "maintenir le cap" de la transition écologique.
"Le président est arc-bouté sur ses positions et il a toujours du mal à accepter un moratoire (...). Il est prêt, en revanche, à mettre sur la table des propositions spectaculaires pour faire tomber la pression. Mais il ne veut pas donner l'impression de reculer devant l'obstacle", affirmait lundi 3 décembre le Premier ministre devant "au moins un des dirigeants politiques reçus à Matignon", rapporte ce mercredi 5 décembre Le Canard enchaîné.
Macron était prêt à suspendre la hausse des taxes dès la fin novembre
Emmanuel Macron a pourtant décidé lundi soir de suspendre la hausse des taxes. "Il faut apaiser le pays et faire un geste", a déclaré le chef de l'État lors d'une réunion à l'Élysée, qui réunissait pas moins de 11 ministres et le chef du gouvernement, selon RTL.
Une décision qu'il était déjà prêt à prendre la semaine dernière, lors de son discours sur la transition énergétique. "La phrase de la suspension des hausses, elle était dans le discours de Macron mardi" matin, a assuré un cadre de la majorité à l'AFP, confirmant une information du Figaro. Le chef de l'État devait proposer de lancer une concertation et dire : "tant que la concertation n'aura pas donné de résultats, je refuserai toute hausse", selon cette même source.
La crainte des sondages
Après avoir abandonné cette annonce, pourquoi le président a finalement changé d'avis ? "Deux éléments ont fortement pesé sur son revirement", explique Le Canard enchaîné. Premièrement, le chef de l'État craignait que ses alliés MoDem et certains députés de La République en marche s'abstiennent ou votent contre le budget 2019.
Mais la grande crainte d'Emmanuel Macron était "surtout les sondages", écrit le palmipède. "L'opinion va-t-elle continuer de soutenir les 'gilets jaunes' ou les images des violences, notamment à Paris, vont-elles l'en détourner", se serait-il interrogé à son arrivée à son arrivée de Buenos Aires dimanche 2 décembre. Les premiers sondages révélant le massif soutien des Français au mouvement des "gilets jaunes" l'ont "estomaqué", selon l'hebdomadaire satirique.
Emmanuel Macron a donc décidé de lâcher du lest. "Il fallait bien lâcher quelque chose pour sortir de cette crise", analyse "un poids lourds de la Macronie", qui reste pourtant sceptique quant à la suite des événements. "Même si on l'habille avec des mesures ambitieuses, ce moratoire va apparaître comme une reculade. Il va acter la fin des réformes", estime-t-il.